Am 22. Februar 2019 haben die Massendemonstrationen in Algerien gegen das 5. Mandat des greisen Präsidenten Bouteflika (81 Jahre) alle vorausgegangenen Straßenproteste an Dimension, Entschlossenheit und auch Heiterkeit übertroffen. Anonym über die Sozialen Medien angekündigt, begannen die meisten Demonstrationen schon vor dem Ende der Freitagspredigt, und sehr viele versammelten sich spontan in ihren Stadtvierteln, um ins Zentrum der jeweiligen Stadt zu ziehen. So vervielfachten sich die Demonstrationszüge und alle polizeilichen Absperrketten wurden hinfällig. Besondere Aufmerksamkeit fanden die Demonstrationen in Algier, wo seit vielen Jahren jegliche Demonstration verboten und zerschlagen worden war. Islamistische Organisationen haben sich von den Protesten ferngehalten. Urbane, vor allem jugendliche Schichten prägen das Bild. Aufschlussreich waren die gerufenen Parolen. Sie persiflierten religiöse Alltagssprüche wie: „Hebe dich hinweg, böses Regime!“ Fröhlichkeit, Ausgelassenheit und geradezu ein Hippy-Feeling verbreiteten sich in einem Land, das mit Angstszenarien von Bürgerkrieg und schießenden Militärs regiert wird. Für den morgigen Freitag wird wiederum anonym zu Massenprotesten aufgerufen. Aber jetzt melden sich zahlreiche Intellektuelle und ehemalige Politiker auch mit eigenen Deklarationen. Ob die Absetzbewegung zahlreicher Mittelschichtssektoren zu neuen politisch-konstitutionellen Wahlszenarien führen oder aber die Straße den Weg zu einem sozialen Aufstand ebnen wird, ist nicht abzusehen. Die Zukunft der Jugend ist blockiert, aber auf der Straße verbreitet sich Optimismus.

Liesse, satire et 5e mandat : Il n’y a pas que Boutef qui a de l’humour…

Depuis le début des manifs contre le 5e mandat, il y a comme un air nouveau qui flotte, quelque chose d’enivrant, une «parenthèse enchantée» pour user d’une formule qui renvoie à la griserie post-Octobre 88.

Oui, depuis les manifestations du 22 février, une date qui, désormais, sera marquée d’une pierre blanche dans notre album collectif comme le 5 Octobre 1988 – il y a de la bonne humeur à gogo, une forme d’ivresse, de légèreté, celle que l’on ressent quand on se libère d’un joug oppressant.

Il faut dire que le mot d’ordre «Silmiya» (pacifique) et le caractère foncièrement pacifique des manifs a largement contribué au succès de cette «insurrection joyeuse».

«Descends dans la rue, le moral monte», a-t-on pu lire sur un statut Facebook, et il faut bien admettre que ces bains de foule démocratiques et populaires, ouverts à tous, s’avèrent une excellente thérapie contre l’anxiété générale des mois d’avant, cette angoisse qui nous prenait à la gorge en constatant désespérément qu’il l’a fait, Nosferatu, que ce n’était pas une blague, que le mec allait bel et bien se représenter, même avec un acte de décès, de mort clinique, en poche, avec un aplomb, un cynisme, pharaoniques, dignes des dictatures pachydermiques les plus moches.

Génie populaire

Et voilà que cette lame de fond qui est remontée depuis vendredi dernier à la surface pour crier d’une même voix, par millions, «Makache Ouada Khamsa !» vient nous remonter prodigieusement le moral et démontrer, comme l’a suggéré Dilem dans l’un de ses dessins, que l’électrocardiogramme du peuple algérien répond et son cœur est plus vivant et plus vibrant que jamais.

Il s’avère – c’est un grand classique au demeurant – que les moments insurrectionnels de cette qualité sont des moteurs de créativité. Ils boostent diablement l’imagination et libèrent une formidable énergie citoyenne.

On assiste ainsi depuis une semaine à une profusion d’images, une production graphique et visuelle, une rhétorique propre aux séquences révolutionnaires.

Et comme on est formellement en période pré-électorale, force est de constater que ce nouveau langage, cette langue délicieusement frondeuse, caustique, cette subversion joyeuse, sont en train de prendre la place de ce qui devait être l’espace électoral. L’on se demande même si ce génie populaire débridé ne va pas mettre à mal les «éléments de langage» des candidats s’ils sont trop en décalage avec la sédition sémantique ambiante.

Ceci, en supposant bien sûr que l’élection présidentielle du 18 avril sera maintenue, ce qui paraît de plus en plus incertain. Il y a comme un «moment hippie», une fougue libertaire, qu’on est en train de vivre, avec, à la clé, et comme toujours, une libération de la parole et un surplus d’imagination et de gaieté diffuse qui nous font sacrément du bien et nous consolent de l’affront du 5e mandat.

Dans cette débauche de créativité, l’humour, la satire, occupent évidemment une place centrale, avec, comme cible toute désignée, le malheureux Bouteflika et sa «issaba» (sa bande) qui sont chaque jour copieusement brocardés, raillés, mangés à toutes les sauces. Le génie populaire a donc trouvé matière à s’exprimer, grâce notamment aux réseaux sociaux, et à se «venger» avec subtilité.

Parodie d’obsèques de Bouteflika

L’une des scènes les plus marquantes observées lors des manifestations étudiantes de ce mardi : cette cérémonie funèbre initiée par des étudiants de Constantine qui ont organisé une parodie d’obsèques du Président fantôme avec un cercueil drapé de l’emblème national et un portrait du «marhoum». Très fort ! Notons que lors des manifs de vendredi, plusieurs manifestants scandaient : «Bouteflika, Allah yerahmou !».

Une autre image hilarante a beaucoup circulé sur les réseaux sociaux : on y voit deux étudiants tenant une pancarte sur laquelle il est écrit : «Aoûdhou bi Allah mina echaytane ar-Régime».

Il s’agit, on l’aura compris, d’un détournement de la formule religieuse habituellement invoquée pour «conjurer les maléfices de Satan», et dans laquelle le mot «eradjim» (le maudit) est remplacé malicieusement par «le régime».

Pour rester avec les démons, un slogan dans la même veine gribouillé sur un bout de carton par de jeunes frondeurs avant-hier, à Alger, disait : «Raïs dawla bi sifate djinn, nasmaâ bihi wala narah» (Un chef d’Etat qui ressemble à un djinn, on entend parler de lui mais on ne le voit pas).

Parmi les pancartes les plus drôles que nous avons recensées, celle repérée par le comédien et humoriste Idir Benaibouche sur laquelle on peut lire cette inscription, surréaliste au possible : «Taslih el ahdhiya» (Réparation de chaussures). Un slogan totalement décalé, en effet (voire conceptuel) qui dénonce férocement l’absurdité de la présentation d’un mort à la tête d’un si beau pays.

Lors des manifs du 22 février, à la Place du 1er Mai, il y avait ce portrait brandi par un militant associatif, et que tout le monde s’empressait de prendre en photo : il représentait un cadre vide avec seulement un simple point d’interrogation à l’intérieur, accompagné de la mention « Président de la République» et en dessous, ce mot d’indignation : «Ya lil ââr» (quelle honte !).

Les détournements du «cadre» qui remplace depuis longtemps maintenant le président réel dans toutes les cérémonies et apparitions publiques sont devenus monnaie courante. On voit ici et là des pictogrammes montrant l’évolution du Président depuis la station debout jusqu’au fauteuil roulant avant de finir simple «cadre» vide comme stade ultime de sa déchéance.

«Satire à vue»

Une autre iconographie facétieuse montre un Bouteflika totalement rabougri qui, commentant les manifs étudiantes, lâche, mauvais perdant : «Mais les élèves du primaire ne sont pas sortis !»

Donc, il continue. El Manchar s’est imposé dans ce registre comme le vecteur incontesté de la dérision subversive. L’un de ses derniers papiers titrait en mimant l’indécente obstination présidentielle : «Si c’est seulement le 5e mandat qui vous dérange, on passera directement au 6e».

Au chapitre des vannes improvisées, on en trouve beaucoup en relation avec le chiffre 5, à l’instar de cette boutade déclinée dans un statut Facebook : «On m’a demandé d’acheter 5 baguettes, j’en ai acheté 4, quitte à crever de faim».

Pour rependre la formule de notre ami Abderrahmane Lounès, depuis le 22 février, «Satire à vue». Bouteflika et sa «hachiya», sa petite cour, en prennent drôlement pour leur grade. On a vu à ce propos plein de blagues sur la longévité du patient de Zéralda, décidément digne d’un Highlander. «Bouteflika est mort plusieurs fois et il ne lui est rien arrivé», assène un trait d’humour largement partagé.

Le ralentissement du débit internet au plus fort des manifs et son blocage par les autorités a donné lieu à plusieurs protestations loufoques. «S’il vous plaît, celui qui est en train de s’amuser avec le modem de l’Algérie est prié d’arrêter ce jeu», s’amuse un usager des réseaux sociaux.

Un message d’erreur parodique mimant un échec de téléchargement d’un logiciel indique : «Impossible d’installer la démocratie ; veuillez nettoyer le système».

L’écrivain Ryad Girod qui est, par ailleurs, prof de maths, a relayé pour sa part une pancarte sophistiquée conçue comme une équation mathématique avec une intégrale bornée par les chiffres «1962-2019» et ce cinglant résultat : «FLN DZ = Fin».

A l’approche du 8 mars, Abdellah Benadouda, l’ancien animateur star de «Système DZ», émission décalée qui passait sur Dzair TV, a posté de son côté : «Merci de scander aussi ‘‘Non à Cheb Yazid !’’. Houwa qdim 3la Bouteflika» (Il est plus ancien que Bouteflika).

La palme revient à Sellal

Une autre série de vannes cible les chaînes de télé qui ont totalement ignoré les manifs de vendredi. El Manchar écrit : «WWF salue l’engagement des télés algériennes en faveur de la cause animale». Des facebookers ont associé le sigle de l’ENTV à des programmes animaliers, rappelant un célèbre sketch de l’indémodable Fellag.

Une petite dernière pour la route : en prévision de la manif de ce vendredi 1er mars, plusieurs appels exhortent les manifestants à soigner leur look devant les chaînes étrangères en sous-entendant que celles-ci vont cette fois couvrir «correctement» l’événement : «Vendredi, plusieurs chaînes étrangères, BBC, CNN, France 24… seront présentes. Ma tbahadlounache, albssou m’lih wa amachtou chaârkom» (Ne nous foutez pas la honte, habillez-vous convenablement et coiffez-vous).

Mais au risque de décevoir nos talentueux humoristes 2.0, la palme pour la dixième année consécutive revient à l’imbattable Sellal qui, contre le cours du jeu, annonce la candidature de Boutef sans pouffer. Nous recommandons vivement son one man show sur Amel TV. Énorme !

El Watan | 28.02.2019

Algerien: „Ein Lachen wird es sein, das euch beerdigt!“

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